28/05/2021
Marcel Aymé : Le Nain
Marcel Aymé (1902-1967) est un écrivain, dramaturge, nouvelliste, scénariste et essayiste français. Ecrivain prolifique, il a laissé deux essais, dix-sept romans, plusieurs dizaines de nouvelles, une dizaine de pièces de théâtre, plus de cent soixante articles et des contes. Il a également écrit de nombreux scénarios et traduit des auteurs américains importants : Arthur Miller (Les Sorcières de Salem), Tennessee Williams (La Nuit de l'iguane).
Le Nain (1934) est un recueil de treize nouvelles précédemment parues dans des magazines et n’ont aucun lien ou point commun entre elles.
Le livre s’ouvre sur le texte lui donnant son nom, où l’on suit les mésaventures d’un nain vedette d’un cirque, qui se réveille un matin devenu un bel homme d’une taille respectable. Il pense en tirer bénéfice et vivre une belle vie, mais il va déchanter. Dans L’Affaire Touffard, un détective flanqué de son adjoint, enquête sur un carnage, douze personnes sont assassinées chez un riche homme d’affaire. Une intrigue à la Sherlock Holmes mais complètement déjantée. Désopilant !
Avec Trois faits divers, deux assassins se rencontrent et se racontent leur crime, rêvant d’un pays où les pauvres tueurs comme eux vivraient tous ensemble. Ici l’écrivain fait preuve d’un humour très noir (« Alors, je ne sais plus bien ce que je lui ai dit, mais j’ai empoigné la hache et je les ai abattus tous les trois, elle et mes deux enfants. – Là, je trouve que tu as été vif, dit Finard. ») Une dernière pour la route, Sporting : deux candidats s’affrontent dans des élections régionales, le radical-socialiste propriétaire d’un club de gymnastique obtenant de jolis succès et le candidat de la droite dirigeant un club de rugby qui enfile les défaites. Les arguments politiques peu à même de convaincre les électeurs, les deux vont la jouer sur le plan sportif. Ambiance Don Camillo à Clochemerle.
Un recueil vraiment très amusant, toutes les nouvelles sont souriantes, jouant sur différents types d’humour ou sur la critique ironique. Il y est question de politique locale, de religion, de morale et aussi d’argent. L’ancienneté des textes nous permet une nouvelle fois de constater l’évolution de nos mœurs, en particulier sur les relations entre les sexes. Ce que les hommes disaient ou pensaient des femmes alors fera tiquer une jeune lectrice d’aujourd’hui… O tempora ! O mores !
Une écriture légère et bien enlevée, un sourire au coin de lèvres tout du long de cette lecture, si vous n’avez jamais lu Marcel, goûtez-y, vous ne pourrez que l’aimer.
« Barbe 90, qui s’en allait pourtant sur ses quarante-quatre ans, avec une paire pour s’asseoir comme deux sacs de farine (et le feu au milieu, si vous voulez bien), était plus enragée que toutes ses cadettes, et le curé disait n’avoir jamais vu, dans toute son existence de curé, une aussi grande putain que cette satanée Barbe de la quarantaine ; même que, quand il la voyait venir à lui, la hanche bourriquante et le flottant de la gorge bien à l’avancée, il était tout heureux d’avoir l’empêche de sa soutane, et encore en plus, de se réciter deux ou trois prières en pensant à ce qu’il récitait. (…) Mais plus que les autres ensemble, il redoutait Barbe dont les péchés faisaient tant de volume et de fracas que le confessionnal en était comme à l’envers, balloté, secoué et remué cul par-dessus tête. » [La Liste]
Marcel Aymé Le Nain Gallimard La Pléiade Œuvres romanesques complètes Tome 2 - 163 pages –
07:00 Publié dans NOUVELLES | Tags : marcel aymé | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook |